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Une marche à travers l'Europe

(en cours)
Récit d'une traversée d'Europe à pieds en solitaire et par les montagnes, du détroit de Gibraltar à Istanbul.
randonnée/trek
Quand : 19/02/23
Durée : 500 jours
Distance globale : 6642km
Dénivelées : +184825m / -182636m
Alti min/max : -1m/3013m
Carnet publié par SamuelK le 08 oct. 2023
modifié le il y a 3 heures 55mn
Mobilité douce
Réalisé en utilisant transports en commun (train, bus, bateau...)
Précisions : Pour me rendre au départ : bus de Bordeaux à Tarifa. Pour le retour : en voilier par la méditerranée ?
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Vue d'ensemble

Le topo : Les Alpes : Grenoble > Aoste (Belledonne, Beaufortin, frontière franco-italienne) (mise à jour : 08 oct. 2023)

Distance section : 239km
Dénivelées section : +11158m / -10826m
Section Alti min/max : 199m/2996m

Description :

14/07/2023 > 28/07/2023
251 km ; D+ 13,1 km ; D- 12,7 km

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Le compte-rendu : Les Alpes : Grenoble > Aoste (Belledonne, Beaufortin, frontière franco-italienne) (mise à jour : 08 oct. 2023)

Après presque une semaine de pause à Grenoble, je reprends la marche sous des températures toujours supérieures à 30°C. Après une première journée sur du plat pour quitter la ville en longeant la Chartreuse le long de l'Isère, je traverse le massif de Belledonne d'Ouest en Est. Je ne sais pas si c'est cela provient de la pause sans marcher, d'avoir eu un rythme tranquille avec peu de dénivelé le mois dernier, ou de la chaleur, mais le fait est que je manque d'énergie, mes jambes n'ont plus de puissance en montée, je suis épuisé de retrouver la montagne. Je pense que la chaleur y est pour beaucoup. Monter par 35°C même à l'ombre est vite épuisant car je n'arrive pas à me refroidir. Quand il n'y a pas d'ombre, n'en parlons pas... Je transpire bien plus que je ne parviens à évaporer ma transpiration, alors mon corps est en surchauffe et ne peut pas suivre. Car c'est bien l'évaporation de la transpiration qui refroidit le corps et non le simple fait de transpirer, je m'en rends bien compte. De plus mon sac-à-dos gilet parvient bien à évacuer la transpiration, mais plus à partir d'une certaine température. Là, je dois m'arrêter régulièrement et boire énormément quitte à me forcer. Une astuce qui fonctionne bien est de mouiller mon T-shirt dès que je croise un ruisseau et de le remettre en l'essorant à peine. Non seulement l'eau froide me rafraîchit par contact, mais l'évaporation de cette eau par le soleil me refroidit également, je me rends alors bien compte que j'ai moins chaud et moins soif. Je pense souvent au fait que notre grande capacité à transpirer et donc à nous refroidir a certainement constitué un avantage évolutif a l'humain. En comparaison, beaucoup d'autres mammifères peuvent courir bien plus vite par exemple, mais très peu temps faute de pouvoir se refroidir. Un jour, j'arrive carrément à une cabane vraiment épuisé après une montée en plein soleil, sur un chemin glissant qui n'existe presque plus où je me fais sans cesse piquer par les orties. Je m'arrête à une source dans un pierrier, prends une douche et fais une lessive en me contorionnant sur les rochers, et me force à boire deux litres d'eau supplémentaires. Je repars, chaque pas est un effort difficile, et j'arrive enfin à la cabane un peu plus haut. J'envisageais atteindre une cabane plus loin mais je n'hésite plus, je m'arrête ici même si j'ai fait une "petite journée", car si je continue c'est le malaise. Il y a des jours où j'ai particulièrement beaucoup d'énergie sans savoir pourquoi, et d'autres où j'ai particulièrement peu d'énergie sans savoir pourquoi. Au moins il est relativement tôt, j'ai le temps de me reposer, de prendre des photos et d'assister à un très beau coucher de soleil.

Après Belledonne, je traverse un autre petit massif puis le Beaufortin jusqu'à Bourg-Saint-Maurice. Ces endroits sont très occupés par des stations de ski en activité aussi l'été pour d'autres activités, des grands complexes hôteliers, bref des villages et stations quasi-exclusivement tournées vers un type de tourisme. Il m'est alors étrange et pas franchement agréable d'être entouré de gens et de se croiser parfois sur les sentiers, sans que la rencontre ou simplement l'interaction paraisse probable au-delà de se saluer. Je trouve ces infrastructures démesurées, comme s'il fallait au moins tout cela pour venir et profiter de la montagne. Le rapport avec les commerçants est généralement froid, impersonnel et parfois désagréable si j'ai la décadence de demander à charger mon téléphone pendant que je bois un café... Je m'efforce de rester ouvert aux rencontres toujours potentielles et inatenndues, tout en étant peu optimiste dans ces endroits qui sentent trop la machine à fric à mon goût. J'en ai un peu marre des bivouac sous les remontées mécaniques et de me sentir intru et en décalage, mais encore une fois cela fait partie de la diversité, du contraste et de la réalité des territoires traversés.

Je descends par hasard entre Moûtiers et Albertville le jour où le tour de France passe par ici. Pendant toute la journée, plusieurs hélicoptères volent pour suivre et filmer l'étape. L'événement attire beaucoup de monde et monopolise gendarmes et policiers. Enfin une interaction humaine sympathique dans un camping au-dessus de Moûtiers, où j'échange un peu avec le gérant sympathique qui m'offre bière et petit-déjeuner pour m'encourager. De là, je monte dans le Beaufortin, un petit massif aux grands pâturages verdoyants où est confectionné ce délicieux fromage. Je descends sur Bourg-Saint-Maurice, avec le plaisir de reconnaître les lieux où j'avais marché il y a trois ans avec des amis lors d'une randonnée du lac Léman à Briançon.

Après un jour de pause à Bourg-Saint-Maurice pour laisser passer un orage aux grêlons casseurs de pare-brises, je m'élance vers la frontière italienne. 1000m de dénivelé positif pour atteindre encore une grosse station touristique, puis de nouveau 1000m de dénivelé positif pour être enfin dans une montagne belle et plus sauvage. Après 30°C en milieu de journée, j'ai à présent du vent, de la pluie et 5°C dans les hauteurs en approchant du col. J'optimise régulièrement mes vêtements accessoires (gants, tour de cou, bonnet, veste) pour m'adapter aux conditions fluctuantes, j'aime bien ce rapport à l'équipement. Le soleil de fin d'après-midi qui perce les nuages en mouvement offre quelques belles photos. Après un dernier passage de pierrier et de névé, j'arrive enfin au col de la Lex Blanche qui marque la frontière. Après avoir été dans les nuages avec quelques flocons de neige, j'ai la chance d'avoir une vue dégagée une fois arrivé au col. J'ai d'autant plus de chance que cette belle éclaircie est de courte durée. Le temps de m'installer dans un vieil abri militaire italien abandonné en contrebas du col, la neige tombe pour de bon et recouvre le paysage. C'est un beau spectacle. Je m'installe dans cet abri en ruine aux fenêtres manquantes, que j'améliore en confectionnant un beau bas-flanc avec des planches en bois pour y passer la soirée et la nuit. Avec du vent, de la neige et -6°C dehors, j'apprécie d'avoir un toit. Le lendemain sera une nouvelle très belle journée de marche en montagne, avec des températures négatives comme du soleil qui tape fort, où je monte au col de Planaval en longeant le grand glacier du Ruitor. Depuis ce premier point de ma marche qui dépasse les 3000m d'altitude, je vois la grande vallée d'Aoste vers laquelle je me dirige. Après une descente très délicate entre névés glacés et pierriers à gravillons, je passe une nouvelle nuit à ‐6°C face au glacier du Ruitor d'un côté, et à la vallée d'Aoste de l'autre. Le lendemain, je descends les 2000m jusqu'à Aoste. Cette vallée me fait penser au lac Léman du côté suisse. Il y a une autoroute, des hammeaux aux belles maisons fleuries, des vignes, des vergers, le tout entouré de montagnes avec des sommets enneigés. Un curieux mélange, où seul le lac Léman serait remplacé par la rivière Dora Baltea à la couleur turquoise. Ça y est, je suis vraiment en Italie. J'apprécie déjà l'accent italien. Je me rends compte que le peu d'espagnol que j'avais progressivement appris en Espagne m'était finalement assez utile. Je souhaite alors apprendre au moins des rudiments d'italien. Nuit au camping, bière et pizza pour marquer cette arrivée et cette première section alpine.

Je monte dans Belledonne avec la Chartreuse et ses falaises en face de moi, et au loin un aperçu des Bauges derrière Chambery.
Je monte dans Belledonne avec la Chartreuse et ses falaises en face de moi, et au loin un aperçu des Bauges derrière Chambery.
Premier bivouac dans les Alpes
Premier bivouac dans les Alpes
Belledonne
Belledonne
Coucher de soleil depuis le chalet du Vay
Coucher de soleil depuis le chalet du Vay
a petite cabane de Pouprezaz dans le Beaufortin, où je passe une journée de pause et deux nuits pour reposer une douleur au genoux et faire d'autres activités que marcher.
a petite cabane de Pouprezaz dans le Beaufortin, où je passe une journée de pause et deux nuits pour reposer une douleur au genoux et faire d'autres activités que marcher.
Lente descente vers Bourg-Saint-Maurice
Lente descente vers Bourg-Saint-Maurice
Dernière montée vers la frontière
Dernière montée vers la frontière
J'y suis, col de la Lex Blanche, frontière franco-italienne !
J'y suis, col de la Lex Blanche, frontière franco-italienne !
Une belle vue depuis ce col lors d'une éclaircie...
Une belle vue depuis ce col lors d'une éclaircie...
...rapidement remplacée par une chute de neige qui recouvre le paysage et le vieil abri militaire où je passe la nuit.
...rapidement remplacée par une chute de neige qui recouvre le paysage et le vieil abri militaire où je passe la nuit.
Face au glacier du Ruitor
Face au glacier du Ruitor
Je longe le glacier...
Je longe le glacier...
...et arrive au col de Planaval à 3000m d'altitude, qui surplombe la grande vallée d'Aoste
...et arrive au col de Planaval à 3000m d'altitude, qui surplombe la grande vallée d'Aoste
Descente vers Aoste à travers de beaux hammeaux italiens
Descente vers Aoste à travers de beaux hammeaux italiens
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